Bilan
après 10.000km: lettre à Elise?
Il est vrai que lorsque je parle d’Elise aux gens, j’en
dresse un tableau plutôt négatif. Sans doute pour
ne pas aller à contre-courant des idées reçues,
pour ne pas les bousculer dans leur conception de l’automobile,
et aborder le sujet en douceur. Mais le propre des dissertations
n’est-il pas de commencer par l’antithèse,
pour finir en beauté et convaincre son public?
Je commence donc par dire qu’elle est bruyante, et…
c’est bigrement vrai. Autant par les remous aérodynamiques
(capoté ou non) que par la suspension qui couine, le moteur
logé à 3 décimètres des tympans, les
vibrations de la carrosserie qui fait un bruit de casserole sur
les mauvaises routes, etc… L’insonorisation est quasi
inexistante (2 maigres tapis de sol!), comme le confort auditif.
Donc, tant qu’à faire du bruit, autant en faire un
joli. Ce n’est malheureusement pas vraiment le cas du 1,8l
120cv d’origine Rover, dont la sonorité interne ou
externe est d’une banalité affligeante. Un pot d’échappement
sport type Larini ainsi qu’un filtre à air type Hurricane
vous raviront les oreilles, avant de les détruire quelques
centaines de kilomètres d’autoroute plus loin, mais
dans la joie et l’allégresse. Quoique, lorsqu’on
sait que le volume sonore sur autoroute est le même vitre
ouverte que fermée (!), on n’est pas à l’après
d’un silencieux libéré.
Continuons
par le côté pratique de la chose: il est aussi difficile
d’y entrer que d’en sortir. Il faudra vous entraîner
un peu pour garder de la souplesse, et ne pas avoir l’air
trop ridicule en sortant, surtout capote en place. Pas de centralisation,
de vitres ni de rétroviseurs électriques, de siège
passager réglable, etc… Light is right…
that’s right! Anecdote: mon critère lors de l’achat
d’une voiture a toujours été de pouvoir y
rentrer un bac de bière dans le coffre. Mouais… Et
bien, j’irai chercher un pack de Trappistes à la
fois!
Ensuite, il faut savoir qu’un voyage avec Elise ne s’improvise
pas. Il s’étudie, se calcule, se mesure. Peut-on
rentrer les valises dans le coffre, au risque de charger sa passagère
de sacs? Arrivera-t-on à remplir les interstices laissés
vacants dans le capot avant, afin de maximiser l’espace
disponible?
A
l’énoncé de tout cela, mon grand-père
m’a demandé : «et sinon, elle a des qualités,
cette voiture?» Petit moment de réflexion, lui qui
est tant habitué à sa Safrane diesel, et plus récemment
son Tucson TDI… C’est là qu’entre en
jeu le conflit entre les «amateurs» d’automobiles,
pour qui une voiture se doit d’être abordable, économique,
pratique, confortable, spacieuse, facile à conduire, reposante,
et puis de toute façon, on-ne-peut-quand-même-pas-rouler-à-plus-de-120-hein!
et les puristes, qui n’hésitent pas à sacrifier
tout cela sur l’autel du plaisir de conduire, et la performance.
En effet, Elise a été conçue pour être
–bien- conduite. C’est tout. Pas pour être pratique,
confortable, facile à conduire, reposante! A noter qu’elle
est tout de même relativement abordable, au vu de sa prestation,
et économique à l’usage. Peu de taxes grâce
à la petite cylindrée, assurance réduite
grâce à la faible puissance, consommation de l'ordre
de 7,5L/100km, ridicule pour une sportive (euh oui, une sportive
roule à l’essence, vous l’aviez compris), fiabilité
grâce à la mécanique de grande série,
induisant une révision tous les 15.000km seulement, au
tarif raisonnable qui plus est. Enfin, comme elle est frugale
et toute d'aluminium et de fibre de verre vêtue, elle est
environment friendly. Top, non?
En
parlant de conduire, ce n’est qu’une fois assis au
volant que l’on commence à l’apprécier
vraiment. La position n’est pas parfaite pour les grands
gabarits (grrr, le genou dans le porte-clés), mais très
agréable et allongée. Le joli petit volant se manie
avec précision, absence de direction assistée aidant,
et les commandes sont assez bien placées: la boîte
est assez ferme mais son levier est d’une belle précision,
rapide et hyper plaisant, l’embrayage est progressif et
le pédalier, superbe au demeurant, est pratique bien que
l’accélérateur soit un peu ferme, et les freins...
Ah, parlons-en, tiens! Privés d’ABS, ils le sont
aussi d’assistance. Il faut donc s’habituer (ou plutôt
se déshabituer de nos voitures actuelles sur-assistées)
pour savoir doser la pédale et éviter le blocage.
Composés en grande partie d’aluminium sur les premiers
modèles, ils sont très légers et inusables:
tout profit pour la tenue de route. Par contre, lors de fortes
pluies, une pellicule d’eau se forme sur le disque, et promet
une belle surprise au premier freinage! On a beau appuyer, rien
ne se passe au premier abord. Effrayant! Mais il suffit de s’habituer
à garder ses distances, et à donner un léger
coup de frein pour évacuer l’eau de la surface des
disques, ensuite appuyer. Et ils n’ont aucun mal à
stopper le faible poids d’Elise (environ 700kg!).
Justement, ce poids plume entraîne des performances de premier
ordre, qu’aucune voiture de si faible puissance ne peut
égaler! L’accélération sur les 3 premiers
rapports est excellente, normale sur le 4eme et honnête
sur le 5eme, un peu long, mais justifié sur autoroute.
La tenue de route est bluffante, mais pointue, moteur central
et empattement court obligent. Je veux dire par là qu’il
ne faut pas s’endormir au volant sur route mouillée,
et qu’un excès d’optimisme en grande courbe
rapide se paye cash (enfin, je n'ai jamais essayé...).
Il en reste que prendre le volant d’Elise est un grand moment.
On fait le plein de sensations et de plaisir, et chaque déplacement
prend des allures de 24 heures du Mans. Car c’est avec délectation
que je l’utilise quotidiennement (47.000km environ au compteur
pour l'instant), et que je prends le plaisir là où
il se trouve: pas dans la vitesse, mais dans les accélérations,
le freinage, la tenue de route, la précision de conduite,
et la concentration et l’application requise pour en tirer
la quintessence. A noter que je dépasse rarement le 130
sur autoroute, bien que, par conscience professionnelle et esprit
scientifique, je l’ai mise à un bon 200, sa vitesse
maxi, et ce capoté et décapoté. Elle n’est
pas faite pour ça.
Le
«plus» d’Elise: c’est un cabriolet. Certes,
lorsqu’une averse passagère pointe son nez, autant
la laisser ouverte car le temps de recapoter, la pluie aura cessé.
L’étanchéité n’est que relative
(oubliez le car-wash ou le lavage haute pression), et une fois
repliée dans le coffre, le volume déjà réduit
de celui-ci s’en trouve encore diminué. Ma fainéantise
m’a poussé à rouler décapoté
par averse légère, la nuit, ou même par 4°,
le matin. Chauffage à fond, ça passe, mais n’oubliez
pas de vous sécher les cheveux avant, sinon c’est
Calipo de tifs assuré. D’ailleurs, mes collègues
ont pris l’habitude de détecter rien qu’à
ma coiffure si je suis venu capoté ou non. C’est
soit relativement peigné au gel, soit Sonic façon
Dragonball en chaleur.
Mais quel plaisir de rouler la nuit à ciel ouvert, le cosmos
étoilé pour seul écran, la douce tiédeur
de l’été vous léchant la nuque, et
jouant du levier de vitesse pour mieux faire ricocher la musique
du Larini sur les talus de cette petite route de campagne. Seul
au monde.
Terminons
par sa robe, si vous le voulez bien. Les mots manquent pour la
définir. Il s’agit pour moi d’une vraie réussite,
digne de figurer dans les annales du design. L’avant, très
inspiré de l’Europa des 70’s (même avant
tronqué, même disposition et formes des phares, clignotants,
entrée d’air frontale,…), s’apparente
à un petit proto des années 60, avec son extracteur
d’air «à la GT40» sur son minuscule capot,
ses phares carénés comme sur les plus belles Ferrari,
son pare-brise bombé, ses prises d’air latérales,
son double pot d’échappement central sous un discret
becquet bien intégré…
Que dire de plus! Que sa petite taille accentue son côté
Matchbox, qui la rend si mignonne?
Vous
l’avez compris, l’essayer, c’est l’adopter.
Mais si elle m’a séduite d’emblée, et
c’est avec grands regrets que je la revendrai dans quelques
années… pour passer à l’Exige, bien
sûr! (NDLR: et j'ai écrit ça
en juillet 2007... Nous sommes en avril 2009!)
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Les caractéristiques et les photos